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10/08/2020 - Scouts toujours malgré la pandémie

L’épidémie de coronavirus a mis à rude épreuve l’organisation des camps scouts estivaux, imposant un protocole sanitaire qui leur a toutefois permis de vivre l’esprit scout malgré tout. La Croix s’est rendue dans trois camps différents dans le Loiret, l’Yonne et en Seine-et-Marne, organisés par chacun des trois grands mouvements du scoutisme catholique.

Ils rêvaient de plaines irlandaises, immergés dans l’univers des Vikings. Le Covid-19 en aura décidé autrement. C’est à deux heures de Paris, dans le Loiret, que la troisième troupe des Guides et Scouts d’Europe du Val-de-Seine a trouvé refuge. Les briques rouges du somptueux château de La Bussière se reflètent dans l’étang. Dans l’urgence, les organisateurs – la maîtrise – ont dû tout revoir : le budget, les lieux de bivouac et les activités. Il aura fallu aussi dominer la fatigue et la frustration, nées de consignes sanitaires tardives. Et tenter de répondre à cette question : comment garder l’esprit scout malgré les nombreuses contraintes ? Pour le comprendre, La Croix est partie à la rencontre de trois troupes scoutes. Nuit tête-bêche sous la tente, gel hydroalcoolique à portée de main et port du masque en cas de nécessité : ils se sont adaptés à un protocole sanitaire jugé « moins drastique » que celui longtemps imaginé.

« Un peu dépassée dans la dernière ligne droite des préparatifs, la maîtrise a pu s’appuyer sur les commissaires de district », raconte Jean-Baptiste, 22 ans, responsable du camp de La Bussière. Des examens retardés pour les encadrants n’ont pas facilité les choses. Mais une fois installés dans le sous-bois du château, les chefs de patrouille épaulent les plus jeunes et veillent au bon respect des gestes barrières. Une confiance qui touche Jacques, 16 ans, chef de patrouille de l’Alcyon : « Cela fait partie de la loi scoute : j’ai confiance en mes patrouillards et en mes chefs pour la respecter et, cette année, respecter en outre les règles sanitaires. »

Lors du grand jeu de ce lundi après-midi de juillet, les quatorze scouts avancent entre les arbres, par groupes, boussole dans une main, ballon d’eau dans l’autre et masque sur le visage. Ce dernier est requis faute de distance suffisante lors de la lecture des balises et l’utilisation de la boussole. Pour Marco, 13 ans, troisième de patrouille et liturgiste, porter le masque est devenu un réflexe. Il est davantage déconcerté par l’absence de certains de ses camarades scouts, qui ont été contraints de faire l’impasse sur ce camp. Les patrouilles ont dû être rebattues, pour n’en former que deux au lieu de quatre habituellement. « Pendant les activités, les rivalités sont différentes, mais cela resserre les liens dans les nouvelles patrouilles », se satisfait Marco.

Une franche camaraderie, c’est aussi ce qui unit la patrouille libre des Gerfauts de Dieppe (Seine-Maritime) des Scouts unitaires de France (SUF). Pendant le confinement, ces sept scouts ont multiplié les échanges. Alexis, 17 ans, le chef de patrouille, affirme avoir préparé le camp, faisant fi d’une éventuelle annulation. Au milieu des coteaux de Tonnerre (Yonne), à près de 400 km de chez lui, il est plongé dans l’histoire de Saint Louis, le thème du camp, avec 81 scouts de 12 à 17 ans. Ils font partie de quatorze patrouilles libres originaires de tout le pays, répartis en trois sous-camps. Et parmi eux, certains Faucons de Dubaï vivent même leur premier camp d’été.

Un joyeux mélange qui a conduit les chefs à un travail de sensibilisation pour expliquer le protocole sanitaire en début de séjour. Les scouts ont appris à faire avec, avec plus ou moins de facilité. « On rabâche beaucoup, mais le protocole n’est pas impossible dans les grandes lignes », explique Éloi, 22 ans, étudiant en master 1 à Sciences-Po Paris et responsable de l’infirmerie sur le camp. Répondant à l’appel de l’AP-HP auprès des mouvements scouts pendant le confinement, le jeune homme a apporté une aide logistique à l’hôpital Necker.

Dans la patrouille des Gerfauts de Dieppe, l’intendant et le cuisinier portent un masque pour préparer le menu du jour. Si les scouts sont venus avec les leurs, le coin des chefs – le kraal – dispose de paquets en cas d’oubli. Fini les repas sur les rondins de bois. Avant de dresser les gamelles et les couverts « qu’on ne partage plus comme avant », précise le première classe Alexis, un scout dresse une nappe en plastique, lavée après chaque repas. Au moment de servir, il lance un rappel à l’ordre : « On ne touche pas la nourriture avec les mains. »

Cet après-midi, ils doivent approfondir les trous à l’aide de la barre à mine pour stabiliser la tente surélevée. Ils craignent d’être en retard, car pendant le confinement, même ceux qui ont un jardin n’ont pas pu s’entraîner comme d’habitude. Ils n’ont participé qu’à quelques défis sur la plateforme en ligne des SUF « scouts à la maison ». De même, certains chefs ont dû valider leur Camp école préparatoire (CEP) à distance, comme Jean, étudiant à Paris de 22 ans. À la différence des années précédentes, le diplôme, une « véritable aide pour appréhender la préparation au camp », est valable seulement un an. « C’était la meilleure chose à faire au vu des conditions », résume Jean.

Des difficultés qui symbolisent l’année très particulière des différentes troupes scoutes. Dans la zone boisée et marécageuse d’Égligny (Seine-et-Marne), la ronde Saint-François de Sales de Paris (17e) des Scouts et Guides de France n’a pas vécu un camp de tout repos : grande proportion de premières années et le mauvais temps des premiers jours. Il en faut plus pour décourager Eugénie, 13 ans, pilote des Colibris, qui voit dans ces épreuves « des histoires à raconter plus grande ». Faute d’entraînement, la pénible construction des tentes surélevées a mis « le moral des troupes au plus bas », raconte Clarisse, 24 ans, directrice du camp et étudiante en cinquième année de pharmacie.

Dans la foulée, la maîtrise a fait le choix de chambouler son programme pour remotiver ses guides de 11 à 14 ans. Au final, elles conservent de précieux souvenirs du raid et d’une grande sortie en canoë. La veillée de promesses pour les quinze nouvelles guides reste également dans les mémoires, même si là encore, les gestes barrières étaient de rigueur. Ainsi, il n’était pas permis de serrer la main lors du salut scout. « Cela enlève un peu de convivialité entre guides », reconnaît Eugénie.

La ronde a toutefois connu quelques sueurs froides. L’une des vingt-quatre guides a présenté des symptômes du Covid-19. « Heureusement, le test PCR s’est révélé négatif. Sinon, on aurait dû fermer le camp », explique Clarisse, soulagée. Suivant rigoureusement la procédure mise en place pour ce type de situation, les parents de la guide ont été avertis, « tout s’est fait sereinement », assure Clarisse.

En plus de la tente servant de pharmacie, le camp d’Égligny, comme chaque camp scout, doit prévoir un lieu d’isolement. Ce dernier a également servi pour les maux de ventre et les coups de fatigue que peuvent connaître les scouts. Finalement, malgré toutes les contraintes sanitaires, pas de doute, pour la jeune Eugénie, être en pleine nature permet de se sentir « à des années-lumière de l’actualité et du coronavirus ».